La moitié de l'humanité serait-elle composée de dangereux détraqués ?
Les ligues de vertu, si bien ridiculisées naguère par John Ford, ne sont pas mortes ; elles bougent encore. Leur cible favorite, comme toujours : les hommes.
Il aurait fallu se méfier, dans les années 90, quand a commencé la chasse aux pédophiles supposés.
De quelques cas avérés, le soupçon s'est étendu ; la plus élémentaire prudence interdit de se trouver seul avec un enfant. Nombre de volontaires, prêts à offrir du soutien scolaire ou entraîner des sportifs, y ont sagement renoncé. Malgré quelques désastres judiciaires, la sacro-sainte "parole de l'enfant" est toujours tenue pour vraie. Les marmots ont libre accès à toutes les images et tous les récits ; leur imagination y découvre des ressources imprévues. Du rêve à la réalité, quand on n'a pas dix ans, la frontière est floue, les enfants fabulent et les adultes les croient. Ceux qui seraient tentés de mettre leurs billevesées en doute sont immédiatement réduits au silence par la troupe des crédules et des bien-pensants.
La protection de l'enfance est un excellent prétexte ; les ligues de vertu la mettent en avant comme un pied dans une porte ouverte pour empêcher de la refermer. En réalité, comme autrefois, leur idée fixe, c'est le sexe des autres ; elle sont bien décidées à lui rendre la vie difficile.
Elles se sont rebaptisées "féministes" ; c'est un replâtrage de surface (1968 est passé par là) mais leur obsession n'a pas changé : vendre chèrement leur peau, surtout celle des autres.
Le corps des femmes serait une sorte de gâteau irrésistible et les hommes, des gourmands prêts à se jeter dessus pour le dévorer.
Il y a peu, c'était une forme de galanterie de complimenter une femme ; ne pas lui jeter un coup d'oeil aurait passé pour de la goujaterie.
Aujourd'hui, plus question ! Ces messieurs doivent garder leurs distances sous peine d'être accusés de tous les vices. Des femmes démodées s'obstinent à apprécier le marivaudage ; il
vaut mieux qu'elles y renoncent, le danger est trop grand pour qu'un homme ose encore s'y risquer. Terrifié à la perspective d'un contact mal interprété, l'homme qui n'osait déjà plus rester seul
avec un enfant, refuse aussi le tête à tête avec une femme.
Dans le monde du travail, la conséquence ne s'est pas fait attendre, on travaille avec les portes ouvertes ou, horreur, en "open space". Disposer d'un bureau
séparé est désormais le privilège des fonctions soumises au secret professionnel. Les autres n'ont plus qu'à méditer la sentence sartrienne : "L'enfer, c'est les autres".
Champagne ! Les patrons exultent. Depuis de temps qu'ils cherchaient un moyen de surveiller l'utilisation d'Internet par le personnel, c'est le rêve
enfin à leur portée. Fliquez-vous les uns les autres !
Féministes à la petite cervelle, vos collègues vous remercient ; vous aurez au moins démontré que l'enfer est pavé de bonnes intentions.